L’abstention n’est pas une fatalité

Une fois de plus, en Martinique, l’abstention est la gagnante des dernières élections législatives avec 61.2% des inscrits au second tour contre 67.1% au premier tour.

Le député le « mieux » élu, Jean-Philippe Nilor recueille les suffrages de 26% des inscrits, Serge Letchimy 23% des inscrits, Bruno Nestor Azerot 21% des inscrits et Alfred Marie-Jeanne 20% des inscrits.

Selon la circonscription, entre 74% et 80% des inscrits ne sont pas représentés par le député élu.

La crise de la représentation est bien là et nous devons tous l’analyser pour tenter d’y remédier.

Nous devons tous faire nôtre l’objectif de faire remonter la participation aux prochaines législatives de 2017.

Car l’abstention, singulièrement celle connue lors des législatives, n’est pas un aléa climatique contre lequel nous ne pouvons rien. A entendre de nombreux observateurs et acteurs de la scène politique, ce phénomène de l’abstention et de la crise de la représentation, est « normal », « n’est pas nouveau ». Bref, c’est comme ça et pas autrement, c’est une fatalité !

Je ne partage pas ce point de vue fataliste. L’abstention, c’est l’affaire de tous.

Tous c’est qui ?

Les citoyens, les élus, les formations politiques et les journalistes.

Les citoyens

Je recommande aux citoyens de conserver précieusement la profession de foi du député élu dans leur circonscription et celles des autres concurrents.

La profession de foi, c’est le contrat passé entre le député et les citoyens. Ce contrat doit servir de base à l’évaluation de l’action du député désormais en fonction.

Donc citoyens, n’hésitons pas à interpeller les élus selon la feuille de route qu’ils ont posée comme contrat initial.

Par ailleurs, consulter les professions de foi de candidats malheureux permettrait, peut-être, de découvrir que certaines propositions de candidats écartés pourraient inspirer les élus actuellement en place !

Citoyens, soyons proactifs et vigilants !

Bien sûr ce contrat connaîtra des avenants au gré de l’évolution de la conjoncture. Ces avenants seront autant d’occasions données au député pour expliquer et détailler sa vision politique et les engagements quotidiens qui en découlent.

Les députés et les partis politiques

Certains candidats ont confié aux media qu’ils étaient épuisés après cette campagne des législatives.

Il est probable que c’est le cas de tous les élus à qui nous demanderons encore des efforts en matière de communication.

Et si, le challenge à relever par les députés était, aussi, de maintenir, pendant la durée de leur mandat, la proximité établie avec la population durant la campagne ?

Nous ne leur demandons pas de s’épuiser sinon d’organiser avec leurs collaborateurs une communication régulière de leurs actions de parlementaire, en soulignant le lien entre leur vision politique et leurs décisions quotidiennes, en décryptant les enjeux des dossiers qu’ils ont identifiés comme prioritaires, en relatant le suivi des travaux de la commission dans laquelle ils siègent à l’Assemblée Nationale.

Par exemple, le choix de la commission dans laquelle ils décideront de siéger peut faire l’objet d’une explication du fonctionnement de l’Assemblée Nationale et d’un éclairage sur la liaison entre vision politique et actions du député.

Compte tenu de la crise de la représentation que nous vivons, je me permets de suggérer aux députés d’organiser des réunions régulières de concertation avec la population martiniquaise afin de procéder, bien sûr, à des comptes rendus de mandats mais aussi à des séances de sollicitation de la contribution des citoyens.

Tous les députés élus disposent d’une page Facebook qui leur permettra, entre autres outils de communication, de maintenir le contact avec les citoyens pour les informer de la tenue de réunions élu / citoyens, du suivi de ces réunions et de l’actualité de leur activité parlementaire.

Messieurs les députés, communiquez s’il vous plaît !

Si les moyens budgétaires dont vous disposez sont insuffisants, n’hésitez pas à solliciter vos formations politiques ou celles qui vous ont soutenus.

En effet, il est bon de rappeler que les partis politiques reçoivent des financements publics afin de remplir une de leurs missions (conférée par l’article 4 de la Constitution française) : concourir à l’expression des suffrages.

Pour information, pour l’année 2010, le PPM a reçu, au titre de l’aide budgétaire publique, 159 024 €, le MIM 62 200 €, le RDM 49 155 € et Bâtir le Pays Martinique 4 906 €.

Source : http://www.cnccfp.fr/docs/partis/comptes/cnccfp_comptes_2010.pdf

Les journalistes

Un des présentateurs d’une soirée électorale du 16 juin sur une télévision locale a conclu en remerciant un consultant en lui disant « merci de votre présence, nous nous sommes beaucoup vus depuis les présidentielles, désormais on va se calmer, et rendez-vous en 2014 »

Cette conclusion est révélatrice de la conception du traitement de l’information politique par certains de nos journalistes.

Mesdames et messieurs les journalistes, n’attendons pas les élections municipales et celles de la collectivité de Martinique en 2014 pour traiter l’information politique autrement.

Par exemple, pourquoi ne pas envisager d’inviter trimestriellement les députés élus, afin qu’ils exposent l’état d’avancement des travaux parlementaires dans lesquels ils se sont engagés, en se basant sur le programme qu’ils ont présenté à leurs électeurs ?

Cela permettrait au citoyen de faire le lien entre la campagne électorale et l’exercice des responsabilités par les élus.

Cette mise en cohérence aurait pour effet d’inciter le citoyen à se déplacer pour voter lors des prochaines élections législatives.

Sans changement de postures et de pratiques des acteurs principaux de la démocratie martiniquaise – citoyens, élus, formations politiques et presse – parions que l’abstention dépassera encore les 60% aux prochaines élections législatives de 2017 en Martinique.

A bientôt.
 

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