Des indicateurs économiques limités

L’IEDOM Martinique et l’INSEE Martinique ont publié leur monographie pour l’année 2011. A cette occasion, les deux établissements  ont présenté, le 28 juin 2012, les grandes tendances de l’année  2011 à la Martinique, ainsi que l’évolution de la conjoncture économique pour le début de l’année 2012.

Au menu, faible croissance du Produit Intérieur Brut (PIB), nombre de demandeurs d’emplois en hausse, maintien de la consommation des ménages et évolution contrastée de l’investissement selon les secteurs d’activité. La pauvreté des indicateurs utilisés ne permet pas de mesurer l’évolution du bien-être des Martiniquais et d’apprécier la dynamique du progrès social.

En 2011, avons-nous été heureux en Martinique ? Plus ou moins heureux en 2011 qu’en 2010 ?

Sommes-nous sur la route, au bord du chemin, à contre-sens d’un itinéraire que nous nous serions fixés ?

Sommes-nous engagés dans une tendance de progrès ou de régression sociale?

Personne ne peut le dire car il n’existe aucun indicateur qui mesure le bonheur et le progrès en Martinique.

Pour une raison simple : Nous n’avons défini ni l’un ni l’autre. Plus exactement nous ne les avons jamais définis collectivement!

Jusqu’à ce jour, tous les programmes politiques des candidats aux élections, les plans, les agendas, les schémas de développement des collectivités ont été le fruit, dans le meilleur des cas, de seuls débats entre experts et responsables politiques. Le citoyen « lambda » a toujours été, de fait, écarté et maintenu dans sa prétendue indifférence et / ou incapacité.

De bonnes intention dans le PADM

Le Plan d’Actions de Développement de la Martinique impulsé par l’actuelle équipe régionale, prévoit une large consultation de la population.  Saluons l’intention et l’orientation.

Cependant, citoyens et citoyennes Martiniquais, soyons vigilants et exigeants sur la mise en œuvre de cette initiative. Six mois après l’installation du comité de pilotage à la mi-janvier 2012, nous n’avons guère de visibilité sur la suite du processus dont les grandes orientations devraient être connues d’ici la fin de l’année 2012. (http://www.martinique.franceantilles.fr/actualite/politique/changer-de-modele-pour-un-autre-developpement-20-01-2012-141391.php)

A ce jour, selon les informations accessibles au grand public, et à ma connaissance, aucune consultation de citoyens « lambda » ne semble avoir été organisée ou planifiée.

Par ailleurs, assigner, a priori, à ce PADM l’objectif de « changer de culture économique » avant d’avoir rencontré la population, sillonné la Martinique et sollicité la contribution des Martiniquais me paraît discutable.

Formons les citoyens, informons la population, encadrons les débats pour que les objectifs, les ambitions et les résultats de cette démarche appartiennent au plus grand nombre de citoyens.

Mais ne limitons pas, a priori, l’ambition de ce PADM au seul changement de culture économique. L’économie ne définit pas, seule, le bonheur, le bien-être, la santé sociale et psychique, l’épanouissement d’un peuple.

Définir la vision d’abord, mesurer ensuite

A l’heure où, au lendemain des élections législatives, de nombreux acteurs politiques se positionnent pour l’élection de la collectivité unique en 2014 (2015 ? 2016 ?), en critiquent le mode de scrutin et l’organisation prévus par la loi du 27 juillet 2011, peu de voix politiques se font entendre pour solliciter la contribution des citoyens à la définition d’un projet martiniquais de société.

Or, il devient urgent d’impulser une délibération publique de qualité afin que la société martiniquaise dialogue avec elle-même.

Je suggère que nous répondions, collectivement, aux questions suivantes :

1 – Quelle est la vocation de la Martinique ? Que choisissons-nous d’apporter au Monde et à nos enfants ?

2 – Quelle ambition nous fixons-nous pour 2025 ? Devenir le hub technologique de l’Amérique Centrale, la principale place financière de la Caraïbe, la locomotive touristique de notre Région, le pays le plus heureux de la zone ?

3 – Avec quelles valeurs ?
  • Institutionnelles : quelle collectivité unique avec quelle organisation, quel mode de scrutin et quelles compétences ?
  • Culturelles et identitaires : l’estime de soi, la confiance,….
  • Ethiques : la transparence, le respect, le partage,… ?

4 – Avec quels principes opérationnels ?
  • Une vraie démarche participative qui permet un échange quotidien permanent entre les responsables et le plus grand nombre de citoyens ?
  • La perpétuation de la logique de l’ordre et de l’obéissance ?
  • Un « mix » des  deux ?

5 – Avec quelles priorités stratégiques ?
  • L’éducation,
  • La santé,
  • L’emploi,
  • Le transport,
  • Les télécommunications, …

6 – Avec quel plan d’actions au quotidien ?

7 – Avec quels indicateurs de suivi de la mise en œuvre de cette vision partagée?

 

Une conférence citoyenne pour solliciter la contribution du plus grand nombre à la construction d’une vision partagée.

Afin de contribuer à la définition d’une vision martiniquaise, partagée, du progrès et du développement, je propose l’organisation d’une conférence citoyenne qui s’appuie sur un panel de citoyens  (entre 15 et 20), des experts et des élus et, in fine, sur une consultation populaire. La procédure s’articule autour de 6 étapes.

1 – La préparation :

Les citoyens du panel sont des « profanes » choisis par le maître d’ouvrage (collectivité, parti ou groupement politique) : ces citoyens ne sont ni spécialistes du développement, ni membres d’un groupement, association, syndicat, parti politique ou lobby.

Il s’agirait de volontaires intéressés par la démarche participative et l’avenir de la Martinique.

Ce panel n’est pas construit sur la méthode statistique des quotas (il faudrait entre 400 et 500 personnes !), mais est diversifié (CSP, commune de résidence, pays d’origine, sexe, âge,…) afin de garantir sa représentativité de la population martiniquaise.

2 – La Formation

Une étape de formation des citoyens (entre 3 et 5 séances)  par des experts exprimant des points de vue contradictoires précède

3 – Le débat public (panel de citoyens / experts / élus) et

4 – La rédaction d’avis argumentés par les citoyens du panel. Ces avis peuvent être contradictoires.

5 – Pour achever la démarche participative, les avis argumentés des citoyens servent de base aux discussions et débats dans les quartiers, sont enrichis par la population des 34 communes, les élus et les experts.

6 – Une consultation populaire portant sur la synthèse des échanges valide ou non la vision proposée.

Chaque étape fait l’objet d’une communication transparente et ambitieuse en utilisant les media traditionnels (Presse écrite, Radio, TV), les réseaux sociaux (Facebook, Twitter) et le web afin d’impliquer au mieux la diaspora martiniquaise.

Cette conférence citoyenne est une proposition d’outil que nous pouvons mettre en œuvre pour construire avec le plus grand nombre de citoyens notre projet martiniquais de société et les indicateurs d’évaluation qui y sont associés.

D’autres dispositifs de mobilisation de l’intelligence collective existent et peuvent aussi être expérimentés.

  Parions que si nous investissons autant d’énergie dans cette démarche de construction d’une vision partagée que celles que nous avons dépensées en 2003 et en 2010 pour la nécessaire construction de  la collectivité unique, nous prolongerons la pensée du Docteur Pierre ALIKER : Tous les Martiniquais (ou au moins tous ceux qui le désirent) deviendront alors les meilleurs spécialistes des affaires martiniquaises !  

Schoelcher, le  12 juillet 2012

Olivier Ernest JEAN-MARIE

Citoyen martiniquais

 

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